75 000 milliards de dollars pour la transition verte en Chine

par Frank Willems, le 12 janvier 2022

Selon une étude officielle, la Chine dépensera au moins 75 000 milliards de dollars au cours des 30 prochaines années pour atteindre la neutralité carbone en 2060. Ces investissements considérables auront un impact positif non seulement sur le climat mais aussi sur l'économie du pays.

 

Transport longue distance à l'hydrogène (photo sur Twitter)
Transport longue distance à l'hydrogène (photo sur Twitter)


Une étude conjointe du gouvernement chinois, d'universitaires et d'institutions privées calcule que la Chine dépensera 75 000 milliards de dollars pour la transition verte au cours des 30 prochaines années. A titre comparatif, cela représente cinq fois le PIB de 2020 de la Chine, soit plus de 50 000 dollars par Chinois.L'étude a été réalisée par le groupe de recherche du Green Finance Committee de la China Society for Finance and Banking sous la direction de Ma Jun, le président du Beijing Institute of Finance and Sustainability, une organisation universitaire qui dépend du gouvernement de la ville de Pékin. Le Green Finance Committee de la China Society for Finance and Banking a été créé en 2005 par la banque centrale et les régulateurs financiers. Outre Ma Jun, 40 autres auteurs travaillent pour des institutions chinoises et occidentales.Avec 75 000 milliards de dollars, l'étude se situe loin au-delà des estimations occidentales les plus élevées. En janvier 2021, Goldman Sachs avait estimé cet investissement chinois à "seulement" 16 000 milliards de dollars, avec la création de 40 millions d'emplois à la clef d'ici 2060.

 

Que représentent 75 000 milliards de dollars pour la Chine ?

La Chine consacre 40 % de son PIB aux investissements, ce qui est un niveau très élevé au niveau modial. Selon le rapport, un quart de ces investissements iraient aux technologies vertes. En d'autres termes, environ 10 % du PNB annuel iraient à la transition verte.Le groupe de recherche de MaJun part du principe que l'investissement dans les nouvelles technologies en vue de promouvoir la neutralité carbone augmentera globalement la productivité et accélérera la croissance, au lieu de la ralentir. Le rapport couvre toute la gamme des technologies nécessaires pour la transition verte, dans chaque domaine.

 


Hydrogène vert, électricité verte, captage et stockage du carbone

Le rôle important de l'hydrogène vert en tant que vecteur énergétique est frappant : les piles à hydrogène serviront aux transports routiers, maritimes et aériens sur de longues distances. Ainsi, l'hydrogène fournira 10% de l'énergie nécessaire pour les avions et les véhicules et 15 % de l'énergie nécessaire à l'industrie chinoise.


Selon le rapport de Goldman Sachs, l'hydrogène chinois représenterait 20 % des réductions d'émissions de GES du pays. Il servira de réserve d'énergie tampon dans la production d'électricité (en combinaison avec diverses sources d'énergie renouvelables) et dans les secteurs où il est difficile d'obtenir des émissions nulles comme la sidérurgie, la pétrochimie, le transport routier de longue distance ou le chauffage des bâtiments.L'électricité sera produite principalement à partir de sources d'énergie non fossiles, à savoir les énergies renouvelables et l'énergie nucléaire. Une petite quantité d'électricité sera encore produite à partir de combustibles fossiles, avec captage et stockage du carbone.


Le secteur du bâtiment et environ la moitié du secteur des transports et de l'industrie utiliseront de l'électricité verte. Les bâtiments seront équipés de technologies permettant d'économiser de l'énergie, comme les panneaux solaires, afin qu'ils aient un bilan carbone positif.Pour l'industrie, malgré les économies d'énergie et l'utilisation d'électricité verte et d'hydrogène, il ne sera pas possible d'atteindre complètement le niveau d'émissions zéro, mais il est possible de s'en approcher. Les émissions résiduelles devront être capturées et stockées, ou réutilisées.Pour le secteur des transports, il y aura une combinaison d'hydrogène avec du biocarburant pour les transports plus lourds, et avec l'électricité pour les véhicules plus légers. À elle seule, l'infrastructure de recharge nécessitera 1000 milliards de dollars d'investissements.

 


Les investissements verts apportent un bénéfice net

Le groupe de recherche affirme que la transition verte augmentera la productivité industrielle. C'est particulièrement important en Chine où l'industrie représente 40 % du PIB. Dans les pays industrialisés de l'OCDE, ce chiffre n'est que de 22,5%.

En outre, une grande partie de l'industrie chinoise est fort consommatrice d'énergie. 65 % de l'énergie chinoise est consommée par l'industrie. L'objectif est de repenser l'ensemble de l'industrie, de la réorienter vers des secteurs à forte valeur ajoutée et à émissions faibles ou nulles, et de réduire son poids dans l'économie.La Chine étant un grand importateur d'énergie fossile, la transformation verte réduira sa dépendance à l'égard des importations. Les investissements verts orienteront les ressources vers les secteurs à forte productivité et à fort potentiel de croissance. Ils stimuleront également la demande globale.La recherche et le développement bénéficieront d'un sérieux coup de pouce. La taille du marché chinois et de l'industrie de la Chine permet de réaliser des économies échelonnées pour les nouvelles technologies.

La Chine est déjà le leader technologique en matière de panneaux solaires, d'éoliennes, de véhicules électriques et de batteries. La Chine peut également prendre la tête de la fabrication intelligente.D'ici 2050, les secteurs à forte valeur ajoutée tels que les dispositifs médicaux, les produits pharmaceutiques et les équipements sophistiqués représenteront plus de 60 % de la valeur ajoutée de l'industrie chinoise.


D'autres mesure sont encore nécessaires

Le rapport cite encore une étude antérieure de Goldman Sachs qui prévoit que la production d'électricité triplera d'ici 2060, la grande majorité de celle-ci provenant de l'énergie solaire, éolienne, hydraulique et nucléaire. Ainsi, la moitié des émissions de carbone sera éliminée.

Par contre, la demande de cuivre augmentera de 15 %, et il faudra beaucoup plus d'aluminium, de nickel et de lithium. La production d'hydrogène sera sept fois plus importante qu'en 2020. Selon l'équipe de Ma Jun, ces chiffres sont toutefois sous-estimés car ils ne couvrent qu'une partie de l'économie.

L'équipe a également calculé que dans le cadre de la politique actuelle de la Chine, le charbon représenterait encore 15 % de l'énergie industrielle en 2050, contre 52 % en 2019. Pour atteindre la neutralité carbone en 2060, le charbon ne devrait plus représenter que 8 % du total en 2050. Un effort supplémentaire reste donc à faire.


Le financement vert n'est-il pas un problème ?

Comment tout cela sera-t-il payé ? Aujourd'hui, 10 % des prêts sont déjà verts, mais ce chiffre doit être porté par étapes à 25 %. Dans le même temps, les banques doivent réduire les prêts polluants. La Chine s'inspirera également des pays développés pour lancer une large gamme de produits financiers verts.Il s'agit notamment d'obligations à taux variable liées à un indice de développement vert, et de produits spéciaux pour les projets à émission zéro, destinés aux investisseurs institutionnels (tels que les fonds de sécurité sociale, les fonds de pension, les assurances...) qui seraient encouragés par le gouvernement à investir dans la neutralité carbone et selon des critères de diminution des GES.Environ deux tiers du montant requis proviendront d'institutions financières, un tiers d'investisseurs institutionnels. Les investisseurs étrangers sont également recherchés, ils sont particulièrement intéressant pour la Chine car les coûts de financement en euros et en dollars sont moins élevés qu'en yuans chinois.

URL de l'article: https://www.chinasquare.be/75-000-miljard-dollar-voor-groene-transitie-in-china/?fbclid=IwAR3K0jhKWjjMz62-AYtSFcW6flf56lipm4h8QU9hvImyfd1hpFL6_EHt3RA