Relations UE-Chine en matière d'écologie : « Tous sous un même ciel »

par Élisabeth Martens, rédigé le 20 janvier 2024, paru le 1 mai 2024 dans l'ouvrage collectif « 60 ans de relations diplomatiques entre la France et la Chine » aux éditions « La route de la soie »

En avril 2021, Xi Jinping, Président de la République populaire de Chine (RPC), terminait son allocution au Sommet des dirigeants sur le climat de cette manière : « Un homme de lettres de la Chine antique disait : " La synergie de tous permet de soulever le poids le plus lourd." Le changement climatique représente pour l'humanité un défi réel, sérieux et de long terme. Je suis convaincu que si nous unissons nos efforts et travaillons en solidarité pour le même objectif, l'humanité relèvera les défis climatiques et environnementaux et laissera aux générations futures un monde propre et beau. » (1)

 

 

Les relations entre la Chine et l'Europe en matière d'écologie ont connu une évolution significative au fil des dernières décennies. Les deux parties ont montré qu'une coopération est possible sur le plan environnemental. Une meilleure compréhension mutuelle jouera un rôle crucial dans les relations bilatérales futures et pourra apporter une réelle contribution à la protection de l'environnement à un niveau mondial.

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a exprimé ce souhait dans un discours à l'intention du Mercator Institute for China Studies et du Centre de politique européenne en mars 2023 : « Il est bon que nos citoyens, nos entreprises et nos diplomates soient à nouveau en mesure d'échanger. Parce que la compréhension mutuelle commence par la discussion. (...) Nous devons toujours être prêts à parler et à travailler avec ceux qui voient le monde différemment. » Elle a ajouté que « La Chine est un mélange fascinant et complexe d'histoire, de progrès et de défis ; elle définira ce siècle. » (2)

 

Bref historique des relations Chine-Europe, et l'écologie ?

En Europe, la pensée écologiste remonte à l'Antiquité. Aristote aurait été le premier penseur européen à distinguer l'être humain des autres êtres vivants. Il oppose la « phusis », ou le « tout ce qui est et advient », à la « technè », ou le « tout ce que l'être humain fabrique ». La « technè » prolonge la « phusis » tout en étant limitée par celle-ci. Cette distinction entre êtres humains et nature forge la pensée occidentale et confère à l'être humain un rôle de meneur. À la fin du 19ème siècle, elle sera aussi à l'origine d'une prise de conscience quant aux ravages provoqués par la révolution industrielle. Le mouvement écologiste naît au cours des années 1970 à partir d'une remise en question de la société de consommation et des manifestations anti-nucléaire. En France, plus particulièrement, l'écologie politique prend son envol dans le sillage de Mai 68. Elle voit la rencontre de deux milieux : les amoureux de la nature, porteurs d'une vision non politique de l'écologie, et une nébuleuse issue du mouvement de Mai 68 face à l'essoufflement du mouvement et au déclin de « l'utopie communiste ».

Le mot « écologie » se dit « sheng tai » en chinois, ce qui se traduit littéralement par « attitude vis-à-vis du vivant ». S'il s'est récemment introduit dans le vocabulaire courant, il rappelle aux populations chinoises leurs traditions agraires respectueuses de l’environnement, leur lien ancestral à la nature, le caractère organique de leur pensée où l'être humain est une partie intégrante du vivant. En Chine non plus, la pensée écologique n'est pas neuve. Les premiers textes chinois sur la protection de l’environnement datent des années 1970 et déclarent d’entrée de jeu que « le pays le plus peuplé au monde cherche à progresser simultanément sur les fronts écologique et économique ». La « Grande muraille verte », un projet de reboisement gigantesque mettant au défi l'avancée du désert de Gobi, a démarré dans les années 1970. Le premier bâtiment public à émission zéro a été inauguré en septembre 2010 à Dezhou en province du Shandong. Il fut nommé le « Ri yue tai », « Terrasse du soleil et de la lune » pour son architecture en rayons dont la couverture remplie de panneaux solaires s'illumine la nuit. Depuis lors, d'innombrables exemples ont montré la volonté de la Chine de s'insérer dans le renouveau écologique qui se dessine au niveau planétaire.

La Chine des années 1970 se rapproche des puissances occidentales. Des relations diplomatiques entre la RPC et la Communauté économique européenne (CEE) s'établissent dès 1975. À partir de 1978, des accords commerciaux sont signés entre la CEE et la Chine. Des joint-ventures et des transferts de technologie se multiplient jusqu'au début du troisième millénaire. Les politiques de réforme et d’ouverture de la Chine se renforcent en 2001 avec l'entrée de la Chine dans l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et accélèrent la coopération entre les deux parties. L’Union européenne (UE) appuie la candidature chinoise avec l’espoir que le pays devienne une économie libérale et que l'énorme marché chinois lui soit enfin accessible.

Dans les années 2000, à mesure que la Chine se hisse au titre de puissance économique mondiale, les préoccupations environnementales gagnent en importance. À la même époque, l'Europe commence à jouer un rôle actif dans la promotion des normes environnementales et du développement durable à l'échelle mondiale. Des collaborations entre l'UE et la Chine s'établissent, elles visent à aborder certains défis environnementaux tels que la pollution de l'air et de l'eau, la gestion des déchets. Des joint-ventures de technologies vertes concernant principalement les énergies éolienne et solaire sont de plus en plus nombreuses en Chine, les investissements chinois en Europe se multiplient.

 

Échange de technologies : énergies éolienne et solaire

Au début des années 2000, les turbines d'éoliennes et leurs composantes étaient conçues et produites en Europe, notamment au Danemark et en Allemagne, puis installées en Chine dans le cadre d’une coopération économique. Une loi chinoise est venue stipuler que les entreprises étrangères ne pouvaient conserver leur accès au marché chinois qu’en transférant leur production sur le territoire de la RPC et en y associant les firmes locales. Grâce à cette politique, l'industrie nationale chinoise s'est rapidement développée et les entreprises européennes ont commencé à perdre du terrain sur le marché des éoliennes. La part des turbines produites en Chine a augmenté de 25 % à 60 % en cinq ans. En 2009, les quatre principales entreprises chinoises -Sinovel, Goldwind, Dongfang Electric et Guodian United Power – sont devenues des leaders mondiaux dans la production de turbines pour éoliennes, alors qu’elles n’avaient été fondées qu’au début des années 2000 en tant que sous-traitants de compagnies européennes.

Le plus grand effort en matière d'investissement chinois fut ensuite consacré à la production et l'augmentation de la taille et de l'efficacité des turbines, alors que l'innovation technologique et industrielle dépendait encore très largement des transferts technologiques venant des entreprises occidentales. Mais, en matière de turbines et de composantes peu sophistiquées, les modèles chinois étaient déjà beaucoup plus accessibles que les modèles européens, ce qui devait permettre à la Chine de conquérir rapidement les marchés occidentaux dans ce secteur. En 2010, la Chine devient la première puissance éolienne au monde, détrônant à la fois l'UE et le leader américain. À partir de là, les objectifs de Pékin ont changé, l'accent fut mis sur l'exportation des technologies chinoises à l'étranger.

Tout comme dans le cas de l'industrie éolienne, le solaire était embryonnaire jusqu'au début des années 2000. Les premiers sites industriels solaires ne produisaient que quelques éléments des panneaux solaires dont le design et le contenu technologique étaient entièrement conçus et développés à l'étranger. Progressivement, grâce au financement de l'État chinois qui a investi massivement dans l'achat de brevets et de technologies occidentales et dans la création de joint-ventures, les compagnies chinoises ont réussi à constituer la base technologique primaire nécessaire. En dix ans, l'industrie chinoise du solaire a évolué de la sous-traitance de certaines composantes à la production de panneaux solaires entiers. Si, en 2003, l’industrie photovoltaïque chinoise ne comptait que pour 1 % du total mondial, la RPC est devenue en 2008, le plus grand producteur d’énergie solaire au monde. En 2009-2010, la Chine a investi 20 milliards de RMB dans le développement de grandes centrales solaires photovoltaïques et dans l'établissement d’une coopération internationale active dans ce secteur. À la fin de 2010, la Chine représentait 60 % du parc mondial, alors que l'Europe en représentait 18,4 % et l'Amérique du Nord 8,2 %.

 

La vision globale de Xi Jinping

En 2008, la crise du système financier néolibéral a été contournée par l’impression que des quantités illimitées d’argent pouvaient être libérées par les banques centrales. Cette politique a surtout profité à la spéculation et a creusé les inégalités inhérentes au système. Au lieu de se soumettre au modèle néolibéral de l'Occident, la Chine est revenue vers sa propre culture où le bien de la communauté prime sur celui de l'individu. Bien que l'UE ait déploré ce choix, la Chine a adopté un système économique et social prenant en compte le niveau de vie et les besoins des citoyens, un système où l'argent prêté par les banques, en commençant par la Banque centrale, la Banque du peuple, est dirigé vers la construction des infrastructures, le développement social, la protection de l'environnement. Dans son discours de mars 2023, Ursula von der Leyen s'est vue forcée de reconnaître que : « En moins de 50 ans, la Chine est passée d'une situation de pauvreté généralisée et d'isolement économique au statut de deuxième économie mondiale et à la première place pour ce qui est de nombreuses technologies de pointe. Depuis 1978, la croissance atteint en moyenne plus de 9% par an, et plus de 800 millions de personnes sont sorties de la pauvreté. C'est l'une des plus grandes réalisations du siècle dernier. » (2)

Avec l'élection de Xi Jinping à la présidence de la RPC en 2013, le pays a accentué son virage à gauche. Une lutte acharnée contre la corruption des cadres et des groupes maffieux a signé un premier « grand nettoyage » du pays. La fermeté avec laquelle le PCC a empêché l'émergence d'une bourgeoisie « comprador » a inquiété l'UE. Après quoi Xi Jinping a entrepris un combat sans merci contre le terrorisme islamique qui s'infiltrait à partir du Xinjiang, une région autonome limitrophe à l’Afghanistan et au Pakistan. L'UE a dénoncé des « violations des droits de l'homme », tout en accusant les coups fatals du terrorisme sur son propre territoire. Récemment, il s'est avéré que les médias de masse qui dénonçaient les « camps de concentration » du Xinjiang ont largement dépassé les règles de l’éthique journalistique dans un climat généralisé de « China bashing ».

Toujours en 2013, Xi Jinping annonce l'ouverture des « Nouvelles routes de la soie », ou « Belt and road Initiative » (BRI). La Chine signe des accords commerciaux avec de nombreux pays d'Asie Pacifique, mais aussi d'Afrique et d'Europe. La volonté de la Chine de partager l’expérience de son modèle de « socialisme à la chinoise » avec d’autres nations du Sud a conduit à une renaissance du Mouvement des non-alignés. La BRI favorise l'esprit de Bandung et de plus en plus de pays à faible revenus (PFR) se tournent vers la Chine pour engager des partenariats économiques avec le concept « win-win » comme dénominateur commun. Mais l'UE y voit une stratégie de la part de Pékin pour s'accaparer les marchés des PFR et leurs richesses minières. En guise de représailles, en 2016, l'UE refuse de reconnaître le statut d’économie de marché à la Chine qui aurait dû lui échoir depuis son entrée à l'OMC, ceci malgré la déclaration de la Chine de faire de la BRI un axe de « développement vert » à l’échelle mondiale.

En 2020, la Chine est encore à l'origine de la création d'une gigantesque zone de libre-échange économique nommée le « Regional Comprehensive Economic Partnership » (RCEP). Ce sont au total quinze pays d'Asie et du Pacifique qui signent cet accord commercial, le plus important du monde, impliquant entre autres l’Australie, la Chine, la Corée du Sud, le Japon, la Nouvelle-Zélande. Si on ajoute l'impact de la BRI à celui du RCEP, Pékin a conclu des alliances avec 68 pays regroupant 4,4 milliards d’habitants et représentant près de 40 % du produit intérieur brut (PIB) de la planète.

 

La réponse de l'UE

L'UE se devait de réagir aux ambitions du géant chinois. La Commission européenne a appelé la Chine à mettre en place des mécanismes de dialogue de haut niveau dans les domaines environnemental, climatique et numérique pour entamer conjointement une coopération verte Chine-UE et un partenariat numérique. Fin 2020, les négociations sur l’Accord global sur les investissements Chine-UE sont conclues. Comme l’a souligné la présidente de la Commission, cet accord « offrira un accès sans précédent au marché chinois pour les investisseurs européens, permettant à nos entreprises de se développer et de créer des emplois. »

La Commission européenne lance également le « Global Gateway » (GG), une stratégie d'investissements massifs de 300 milliards d'euros dans des infrastructures numériques, de transport et d'énergies vertes partout dans le monde. De nombreux observateurs pointent du doigt les ressemblances entre le GG européen et la BRI chinoise. Les objectifs principaux des deux projets sont similaires : améliorer la connectivité et les échanges commerciaux entre les régions, stimuler la croissance économique en favorisant les investissements et créer un réseau de connections et liaisons mondiales à travers des projets d’infrastructures, de facilitation du commerce et de coopération économique. À l’instar de la BRI, le GG a des projets répandus sur tous les continents et se focalise sur le développement vert.

Interrogé à propos du plan européen, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin, a souligné qu’il existe un vaste de champ de coopération dans le domaine des infrastructures mondiales. Il se félicite que le programme d’investissement du GG n’ait pas exclu les pays qui font déjà partie de la BRI. Pour lui, il n’est pas question que les diverses initiatives en la matière se fassent concurrence ou se remplacent. Ce monde a besoin, selon lui, de construire des ponts au lieu de les démolir, et d’être mutuellement bénéfiques au lieu d’être fermés et exclusifs, principalement lorsqu'il s'agit de la protection de l'environnement, de l'actualisation des énergies vertes et du soutien aux PFR dans leur lutte contre le changement climatique. « C’est l’approche qui profitera réellement à tous les pays du monde qui est la plus proche du succès », déclare Pékin fidèle à la notion de « civilisation écologique » inscrite dans la Constitution chinoise dès les premières années de présidence que Xi Jinping.

 

Des relations Chine-UE actuelles complexes

La situation actuelle des relations Chine-Europe en matière d'écologie est complexe. D'un côté, il y a une reconnaissance croissante des enjeux environnementaux par les deux parties. La Chine a pris des mesures drastiques pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et promouvoir les énergies renouvelables. Bien qu'elle soit encore fortement dépendante des énergies fossiles, en particulier du charbon, elle est devenue en dix ans le pays qui s’est le plus développé dans le domaine de l’amélioration de la qualité de l’air, qui a réussi à garantir que 87 % de ses cours d’eau soient sains et qui peut prétendre au quart des étendues reboisées dans le monde. La Chine est arrivée à cela en utilisant une approche holistique des questions économiques et écologiques.

Quant à l'UE, elle a renforcé ses engagements en matière de développement durable et de lutte contre le changement climatique, elle a fait des progrès significatifs dans l'adoption des énergies renouvelables, avec des investissements importants dans l'éolien, le solaire et d'autres sources d'énergie verte. Cependant, des défis persistent. Les différences dans les approches politiques et économiques entre la Chine et l'Europe peuvent entraver la coopération en matière d'écologie. Les préoccupations liées aux droits de l'homme, aux normes du travail et aux pratiques commerciales équitables influent sur des relations bilatérales harmonieuses.

Si la démocratie européenne permet une prise de décision pluraliste reflétant une variété d'opinions et de préoccupations liées à l'environnement, le système politique chinois présente d'autres avantages : des prises de décisions rapides suivies de mises en pratique tout aussi rapides. Or l'état de la planète plonge l'humanité entière dans l'urgence, en témoignent les cyclones meurtriers sur l'Afrique australe, les incendies gigantesques en Australie, au Canada, en Grèce, les inondations et les glissements de terrains en Asie, le dégel du permafrost en Arctique et au Tibet, etc., un nombre toujours croissant de catastrophes naturelles liées au changement climatique qui jettent des millions de personnes dans la misère du jour au lendemain.

Mais comment comprendre les enjeux climatiques et environnementaux de notre époque sans interroger le premier émetteur de CO2 mondial ? Le développement vert de la Chine, en passe de devenir la première économie mondiale, constitue l’une des priorités du pays. La Chine est un des États affichant le plus d’ambition face au changement climatique. Les objectifs de Pékin sont clairs : arriver au pic d’émissions de CO2 avant 2030 tout en triplant les énergies renouvelables pour atteindre la neutralité carbone avant 2060. Selon un rapport du Groupe de la Banque mondiale, la Chine devrait être en mesure de respecter ses engagements climatiques et de mener sa transition vers une économie plus verte tout en réalisant ses objectifs de développement. (3)

« L’humanité ne peut se permettre de perdre la bataille contre les changements climatiques », a déclaré Xi Jinping (1). Sans une victoire de la Chine, le but de rester sous la barre des 1,5°C de réchauffement par rapport à la période préindustrielle ne peut être atteint. Il est donc essentiel que les pays industrialisés soutiennent les efforts de la Chine, qu'une diplomatie environnementale entre la Chine et l'UE soit mise en place pour aborder les préoccupations environnementales communes et résoudre les différends politiques de manière constructive. L’UE a déclaré qu'elle réduirait ses émissions de gaz à effet de serre de 55 % d'ici 2030 et deviendrait neutre en termes d’impact climatique d’ici 2050. Elle aussi a tout intérêt à promouvoir les investissements internationaux dans des projets durables et à encourager des initiatives conjointes qui bénéficient à la fois à la Chine et à l'Europe sur le plan environnemental.

 

Une ONU rénovée pour une planète saine

Cependant le monde a changé ces trois dernières années. Les tensions actuelles – autour de trois zones de conflits principales : Ukraine, Gaza, Taiwan - sont un obstacle majeur pour atteindre les objectifs requis par les Conférences des parties (COP) depuis leur fondation (Rio, 1992). La recherche de la paix devrait être le premier objectif pour les défenseurs de la stabilité climatique. Mais l'UE semble incapable de penser la Chine autrement que comme une menace : « Une politique européenne forte envers la Chine doit s'appuyer sur une coordination étroite entre les États membres et les institutions de l'UE, ainsi que sur la volonté de contrecarrer des tactiques qui viseraient à nous diviser pour mieux régner », a déclaré Ursula von der Leyen dans son discours de mars 2023, ajoutant que « Nous devons nous attendre à de nettes pressions pour que la Chine devienne moins dépendante du reste du monde, mais le reste du monde plus dépendant de la Chine. » (2)

Quant à Xi Jinping, il a clairement opté pour le multilatéralisme : « Nous devons prendre chacun des décisions plus fortes, approfondir les partenariats et intensifier la coopération pour nous inspirer mutuellement et réaliser des bénéfices partagés dans la nouvelle marche vers la neutralité carbone au niveau mondial. Pour y parvenir, il faut coopérer et non s'accuser mutuellement, persévérer et non revenir sur sa parole, et honorer ses engagements et non manquer aux promesses. » (1) L'observation de terrain montre qu'à mesure que les initiatives chinoises s’érigent en consensus internationaux (BRI, RCEP, etc.), elles génèrent une série de biens publics au profit du monde entier tout en favorisant les technologies vertes. António Guterres, secrétaire général aux Nations unies, en est conscient : « La Chine est désormais un pilier important du multilatéralisme, dont l’objectif consiste justement à forger une communauté de destin pour l’humanité. »

Depuis plus de vingt ans, Pékin pousse en avant ce concept de « Communauté de destin humain », un concept diplomatique qui concerne l'humanité entière et qui, à terme, pourrait devenir une ONU rénovée, débarrassée de l'aberration néolibérale. Pourquoi l'UE ne pourrait-elle pas s'appuyer sur une présence forte de la Chine au sein de la communauté internationale pour éliminer le seul véritable responsable de la destruction de notre environnement : le capitalisme, une économie de marché marquée par la surproduction et spéculation financière. Pourquoi ne pas lancer une campagne de « déprivatisation » touchant les secteurs publics : les banques, les infrastructures tertiaires, les soins de santé, l'enseignement, les télé-communications, les moyens de transports, etc. La mise en demeure du modèle de production intensif des années soixante ne représente-t-elle pas le début d'une guérison de notre planète malade ? L'écologie, la protection de la biodiversité, la lutte contre le réchauffement climatique deviendraient dès lors la préoccupation première et majeure de toutes les nations. Or quelle est la « communauté de destin humain » si ce n'est l'avenir de notre planète ?

De nouveaux aménagements diplomatiques entre la Chine et l'UE doivent être dirigés vers des plans à long terme visant le développement vert et la gestion des technologies nouvelles : la circulation de matières premières critiques comme le lithium, le cobalt, le graphite indispensables à l'essor des énergies propres, la production d'hydrogène vert en vue d'organiser un transport rapide et non polluant, la répartition de notre « or bleu » avant que l'eau ne devienne une source de conflits ingérables, la gestion des technologies émergentes comme l'informatique quantique, la robotique et l'intelligence artificielle qui peuvent soutenir la transition écologique si elles sont utilisées à bon escient, les échanges de savoirs scientifiques, entre autres, dans la fusion nucléaire... tant de domaines à explorer et à redistribuer qui donnent à l'humanité l'espoir d'une coexistence plus harmonieuse entre l'homme et la nature, car nous vivons « tous sous un même ciel ».

 

Sources :

Toutes les informations contenues dans ce chapitre proviennent d'articles du site http://www.chine-ecologie.org/ sauf :

 

  1. http://be.china-embassy.gov.cn/fra/zgyw/202104/t20210422_8970357.htm
  2. https://france.representation.ec.europa.eu/informations/discours-de-la-presidente-von-der-leyen-sur-les-relations-ue-chine-lintention-du-mercator-institute-2023-03-30_fr
  3. https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2022/10/12/china-s-transition-to-a-low-carbon-economy-and-climate-resilience-needs-shifts-in-resources-and-technologies

 

Bibliographie :

Bastianelli Nathalie, « Quand la Chine s'éveille verte ... », éd. de l'Aube, 2021

Magazine Dialogue France-Chine, « La Chine et l'Europe sèment les graines d'une croissance mondiale durable », éd. La Route de la Soie, septembre-octobre 2020

Finamore Barbara, « Will China save the planet ? », éd. Polity, 2018

Dhomps Pierre et Tsiang Henri, « Le Big Bang des Nouvelles Routes de la Soie », éd. L'Harmattan, 2017

 

Biographie :

Élisabeth Martens, biologiste (ULB), spécialisée en Médecine chinoise (Nanjing - RPChine), enseignante en médecine et pensée chinoises, en pratiques de santé taoïste, gestionnaire des sites http://www.tiandi.be/, http://www.chine-ecologie.org/, http://www.tibetdoc.org/, auteure de « Histoire du bouddhisme tibétain, la compassion des puissants » (2008), « Qui sont les Chinois ? Pensées et paroles de Chine » (2013), « Méditation de pleine conscience, l'envers du décor » (2020).