La Révolution verte de la Chine face au « China bashing » trumpiste

par Elisabeth Martens, le 9 juin 2020

Avec des chiffres affolants comme: 100 tonnes de charbon brûlés par seconde, 480 tonnes d'ordures déversées par minute et 1800 nouvelles voitures construites par heure, le gouvernement chinois est conscient d'être au cœur du problème écologique de la planète. Si la Chine parvient à mettre en place une économie verte efficace à long terme, elle épargnera sans doute le reste de la planète. C'est la raison pour laquelle le regard de tous les écologistes devraient se tourner vers elle.

 

Si la croissance économique des « trente glorieuses chinoises », de 1980 à 2012, ou de l’avènement de Deng Xiaoping à celui de Xi Jinping, a valu à la Chine de se hisser au rang de seconde puissance mondiale, voire de concurrencer les États-Unis, elle a pour cela payé un lourd tribu avec une augmentation drastique de sa consommation d'énergie. Cette consommation effrénée est toutefois à relativiser : un Chinois moyen consomme cinq fois moins d'électricité qu'un Américain moyen.

Cependant, la Chine reste le plus grand émetteur de gaz à effet de serre au monde. Elle doit se battre contre la pollution de l'air, mais aussi contre la toxicité des rivières, la fonte des glaciers, l'avancée des déserts, des conditions climatiques extrêmes, etc. En outre, elle doit compter avec une croissance démographique difficile à freiner, malgré le plan de restriction des naissances mis en place dans les années 70. Depuis toujours, la Chine représente le cinquième de la population mondiale; actuellement, ce sont 1,4 milliards d'habitants, plus que celle de l'Amérique du Nord et de l'Europe réunis.

Les États-Unis d'Obama avaient compris les efforts écologiques de la Chine et avaient engagé avec elle une collaboration qui promettait des résultats fructueux au niveau du développement des énergies propres. Les Américains, rapidement talonnés par les Européens, apportaient leur bagage de savoir-faire ingénieural et managérial. Quant aux Chinois, ils proposaient des inventions qui ne manquèrent pas d'étonner leurs collègues occidentaux : des technologies capables de réintégrer le CO² dans le sous-sol, la mise en place de culture d'algues qui se nourrissent de CO², des éoliennes hautement performantes qui résistent aux températures et aux vents extrêmes, des technologies de géothermie dynamique, des programmes de reforestations avec symbiose végétale, des bâtiments publics climatisés grâce à la différence de température entre l'eau et l'air, bref toutes sortes de technologies radicalement nouvelles qui, tout en sauvant la Chine, pourraient aussi changer les déséquilibres écologiques de la planète et éviter une catastrophe climatique.1

Or ce que nous constatons aujourd'hui est un gouvernement trumpiste qui, profitant de la crise sanitaire du Covid-19 dont l'origine serait soit-disant le labo P4 de Wuhan, mène un "China bashing" détonnant et y entraîne l'Union européenne, les Verts compris. Dans l'influent quotidien allemand Die Welt, Steve Bannon, ex-conseiller de Donald Trump, a jugé que « l'Occident est depuis longtemps dans une "guerre chaude" avec Pékin - "dans la cybernétique, la propagande et, bien sûr, l'économie". Il ouvre le débat sur de possibles nouvelles agressions contre la Chine avec la menace de glisser vers un conflit armé. Principal représentant de l'extrême droite aux États-Unis, Bannon appelle l'Europe à une guerre commune contre la Chine, argumentant que si les États européens ne voulaient pas devenir les "vassaux de la Chine", ils devraient se battre aux côtés des États-Unis.

Même les Verts allemands seraient en train de flirter avec Steve Bannon jusqu’à partager avec lui cette odieuse campagne de “China bashing”. En effet, l'intervention de Bannon a lieu alors qu'une faction fortement anti-chinoise émerge dans la politique allemande, qui - soutenue notamment par la presse de Springer - se compose principalement de fonctionnaires du FDP, de l'Alliance 90/Les Verts et de certaines parties de l'Union démocrate-chrétienne et propage le resserrement des rangs avec l'administration Trump contre Pékin.2

Le gouvernement allemand, quant à lui, s'efforce de jouer un rôle indépendant dans la lutte pour le pouvoir entre les États-Unis et la Chine - dans l'intérêt de l'industrie allemande et d'une montée en puissance de la politique européenne. Comme la plupart des acteurs du monde politique, les Verts sont eux aussi incapables de penser la Chine autrement qu'à travers leur propre conception de la "démocratie" et des "droits de l'homme". Or la Chine n'a pas besoin de travailler à affaiblir le modèle européen de "démocratie pluraliste". Tel un dragon qui sommeille au fond du lac en hiver, elle observe l'Italie, la Hongrie, la Pologne, la Tchéquie, voire la France, bref, nos "démocraties" où, comme aux États-Unis, 2% des "influenceurs" font voter 98% des électeurs. L'Europe est désormais largement dans cette situation.

Il suffit d'attendre... et la Chine est patiente. En attendant, elle continue sa course vers une Révolution verte qui s'avère prometteuse pour la planète entière.

 

 Notes :

1 https://www.youtube.com/watch?v=SQrwfn-cvwo

2 https://www.thewirechina.com/2020/05/24/steve-bannon-on-hong-kong-covid-19-and-the-war-already-underway/ (article traduit par Albert Ettinger)