Sus aux barrages dans les gorges du Saut du Tigre

par Élisabeth Martens, le 12 mars 2023

Les gorges du Saut du Tigre située sur le haut Yangzi (province du Yunnan) forment un canyon de 2000 mètres de profondeur, c'est le plus profond du monde. Le nom des gorges se réfère à une légende qui raconte que, pour échapper à un chasseur, un tigre a sauté par-dessus le canyon en son point le plus étroit, tout de même large de 25 à 30 mètres !

 

 

Le Saut du Tigre sur le Yanzi (Yunnan)
Le Saut du Tigre sur le Yanzi (Yunnan)

Les habitants d'origine sont les Naxi, ils vivent dans quelques petits hameaux le long des gorges. Leurs principaux moyens de subsistance sont la production de céréales et l'écotourisme. Les randonneurs qui s'aventurent jusque là suivent un sentier à mi-pente. Il va de la ville de Quiaotou jusqu'à Daju et permet de découvrir une variété stupéfiante de micro-écosystèmes. Le sentier est bien entretenu, les Naxi l'utilisent dans leur vie de tous les jours.

En 2007, quand j'ai visité les gorges du Saut du Tigre, il y avait un projet de construction d'une série de barrages en cascade qui allait entièrement immergé ce site unique. Un déplacement d'environ cent milles personnes était également prévu. Mais il y a eu une forte résistance de la part des populations locales, surtout des Naxi. Ils ont engagé une lutte qui a duré plus de deux ans, de 2004 à 2006. Même lorsque les travaux avaient déjà démarré, les Naxi ont poursuivi leurs manifestations et ils ont eu raison car, finalement, ils ont eu gain de cause. Les militants ont empêché ce projet de barrages en cascade.

Population locale, les Naxi
Population locale, les Naxi

 

On aurait pu s'attendre à de la répression de la part des autorités chinoises, mais en ce qui concerne les problématiques écologiques, elles se montrent beaucoup plus permissives que lorsqu'il s'agit de revendications territoriales ou de critiques de la politique menée par Pékin. Contre toute attente (de notre part, car nous avons des tas de clichés en tête à propos de la Chine), il existe en Chine une organisation de recherche environnementale à but non lucratif. Elle est basée à Pékin et se nomme « l'Institut des affaires publiques et environnementales » (ou IPE). Depuis sa création en mai 2006, l'IPE a développé la base de données « Blue Map » (wwwen.ipe.org.cn), ainsi que l'application « Blue Map », la première application mobile environnementale chinoise à suivre les données de pollution en temps réel. Elle a été mise en ligne en 2016 et, depuis, elle est très utilisée par les internautes pour dénoncer la pollution des eaux ou pour déclarer des problèmes environnementaux locaux.

Le Site Web affiche toutes les données et informations environnementales sur les projets de l'IPE et sert d'outil pour les achats écologiques et la finance verte : http://wwwen.ipe.org.cn/index.html

Le Data Center intègre des informations de haute qualité sur les données environnementales à l'usage des ONG, des organismes de recherche internationaux, des entreprises et autres : http://wwwen.ipe.org.cn/reports/NewsReport.html

La Blue Map App est l'application mobile qui offre un accès en temps réel aux informations environnementales, facilite la supervision des entreprises et ouvre une discussion citoyenne à propos de l 'environnement : http://wwwen.ipe.org.cn/appdownload30_en/pc/index.html

Les applications de ce type se sont multipliées. Les citoyens s'expriment librement sur ces réseaux sociaux, ils sont prévus à cet effet. Pour le gouvernement, c'est une fenêtre ouverte sur l'avis des citoyens, un moyen efficace pour prendre la température sociale en ce qui concerne l'environnement. C'est aussi un moyen de diffuser les stratégies de gouvernance environnementale et cela donne au public la possibilité d'y réagir.