La Chine étudie les moyens de protéger la biodiversité dans la vallée de Yarlung Zangbo

par Shan Jie, Fan Wei and Li Jieyi de Medog pour Global Times, le 22 novembre 2021

Le grand canyon de Yarlung Zangbo au Tibet (Xizang) est l'un des endroits les plus mystérieux et les plus isolés du monde. C'est aussi un riche trésor de biodiversité que la Chine veut protéger.

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La vallée, la plus longue et la plus profonde de la planète, est un paradis isolé pour de nombreuses espèces anciennes et rares, qui peuvent se multiplier librement à ce jour, loin de l'influence des activités humaines.

Mais elle est également confrontée à d'énormes défis. Certains chercheurs et environnementalistes prévoient que les activités humaines, le changement climatique et d'éventuels travaux d'ingénierie à grande échelle pourraient rendre incertain l'avenir de l'écosystème du Grand Canyon de Yarlung Zangbo.

Heureusement, les habitants de la réserve naturelle ont pris conscience de la nécessité de préserver ce trésor de la nature. La protection des forêts est devenue une tâche essentielle pour la région de Medog et les autres régions voisines. Les Monpa locaux ont également abandonné la chasse, ils ont changé de casquette pour devenir des gardes forestiers.

Par ailleurs, des groupes de recherche ont intensifié leurs efforts en matière de préservation de l'écosystème. Les chercheurs posent des appareils discrets pour enregistrer et révéler la vie d'animaux rares dans ce royaume mystérieux dans le but d'éveiller les consciences, ce qui peut contribuer à mieux protéger la faune de la vallée du Yarlung Zangbo.

Dès le début de la fondation de la République populaire de Chine, le Parti communiste chinois (PCC) a conduit le peuple à lutter contre la pauvreté. Depuis le 18ème Congrès national du PCC (2012), cette lutte contre la pauvreté a été combinée avec la lutte pour la conservation écologique. Les populations locales s'investissent dans la protection de l'environnement qui, dans le Grand Canyon de Yarlung Zangbo, jouit d'une écologie riche et fragile.

Depuis 2016, 1 million de personnes vivant dans la pauvreté ont été sélectionnées et embauchées en tant que "éco-rangers". Le gouvernement central a débloqué 14 milliards de yuans (2,2 milliards de dollars) en trois ans pour soutenir le système des éco-rangers. Fin 2019, la politique visant à sortir les résidents de la pauvreté tout en protégeant les forêts et les prairies fut bien installée. Grâce à ces politiques, les précieuses ressources de l'écologie ont été maintenues, tandis que les populations locales sont en mesure d'améliorer leurs revenus et leurs moyens de subsistance.

 

Un musée naturel de la biodiversité

Il faut près de neuf heures de route pour aller de l'aéroport le plus proche, celui de Nyingchi (dans la région autonome du Tibet ou Xizang, au sud-ouest de la Chine), à la ville de Medog. C'est là que se situe la plus grande partie de la réserve naturelle du Grand Canyon de Yarlung Zangbo.

Les paysages changent rapidement: on passe des vastes prairies que l'on voit couramment sur les hauts plateaux du Xizang, à des montagnes couvertes de grands épicéas et pins spécifiques du climat subpolaire, puis à la jungle avec d'énormes bananiers et autres plantes des régions subtropicales humides où les arbres sont toujours verts. Il n'est pas étonnant que la région du Grand Canyon de Yarlung Zangbo ait une telle valeur pour l'étude et le maintien de la biodiversité de la planète.

La vallée de Yarlung Zangbo, longue de 504,6 kilomètres et présentant un dénivelé de plus de 7 000 mètres, se trouve dans les 34 principaux points importants pour la biodiversité dans le monde. La vallée a été surnommée "musée de la végétation naturelle" car elle réunit presque tous les types de végétation terrestre, des zones tropicales aux zones arctiques, y compris certaines espèces rares, voire uniques.

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C'est également l'habitat de nombreux animaux menacés, tels que les léopards des nuages et les gorilles rouges. C'est le seul habitat confirmé des tigres du Bengale en Chine.

Y sont répartis 65 % des espèces de plantes supérieures connues et 50 % des mammifères. Au total, on y trouve plus de 3 000 espèces de plantes supérieures.

Le mont Namcha Barwa situé dans la réserve naturelle de Medog s'élève à 7 782 mètres, tandis que Pasighat, l'endroit le plus bas du district de Medog, se situe à environ 155 mètres. Sur une courte distance, cet énorme dénivelé crée une biodiversité particulièrement riche, a déclaré Liu Zhen, un responsable de l'administration des forêts et des pâturages de Medog.

"La vallée est également un canal qui apporte l'air humide de l'océan Indien comme dans une cheminée, cela constitue un écosystème forestier complet dans la région", a déclaré Liu. "Un tel paysage est très précieux et rare".

La réserve naturelle de Medog a été créée en 1985 par le gouvernement régional du Xizang, puis elle a été élevée au niveau national l'année suivante par le Conseil d'État. En 2000, son titre achangé, elle s'appelle maintenant la "réserve naturelle nationale du Grand Canyon de Yarlung Zangbo" et sa superficie a été augmentée. Aujourd'hui, elle couvre plus de 900 000 hectares sur quatre comtés et districts.

Les scientifiques ont déclaré qu'il y avait encore des inconnues dans l'évaluation de la biodiversité de cette zone. Un article publié dans Nature en avril 2021 précise que de nouvelles espèces et même de nouveaux genres de vertébrés ont encore été découverts ces dernières années.

De 2005 à 2020, on a annoncé la découverte d'au moins cinq nouvelles espèces de grenouilles ou de crapauds dans la région de Medog. En 2015, un article annonce la découverte d'une nouvelle espèce de primate, le macaque à joues blanches, dans la même région.

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La taupe de Medog a été collectée pour la première fois en 2019 par des scientifiques de l'Institut de zoologie de Kunming relevant de l'Académie des sciences de Chine à Medog. La taupe de Medog vit dans les buissons entre 2 400 et 3 700 mètres d'altitude et n'a été trouvée que dans deux villes du canton de Medog. Elle appartient au genre Alpiscaptulus et est apparentée aux taupes vivant en Amérique.

 

Une autre façon de défendre les frontières

Dechen Drolma et Metog sont vêtues de gilets orange et portent des réservoirs d'eau, elles marchent dans les forêts à environ une heure du canton de Medog.

Drolma et Metog sont des gardes forestiers, leur tâche est de protéger les forêts de la région. Elles doivent prévenir les incendies et les parasites potentiels.

Les deux femmes sont des villageoises du village voisin de Miri dans lequel les 36 ménages participent aux travaux de protection de la forêt et patrouillent à tour de rôle. Chaque jour, les gardes forestiers sont de service de 9h30 à 18h30.

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Les deux femmes, auparavant femmes au foyer, ont déclaré qu'elles comprenaient le sens de leur travail et souhaitaient protéger les forêts.

Un type d'arbre précieux, grand et droit, qu'elles gardent est appelé Lagerstroemia subcostata Koehne (Subcostate crape myrtle ), mais les locaux l'appellent l'arbre du "cri du singe". "Parce que son tronc est si lisse que les singes ne peuvent pas y grimper", explique Liu.

Cet arbre, le "cri du singe" ne se trouve plus que dans les montagnes de Gaoligong dans la province du Yunnan et dans le Medog du Xizang.

Depuis 2012 environ, Medog a formé une équipe de gardes forestiers comprenant 44 gardes professionnels, 51 capitaines et 2140 villageois. Les villageois peuvent non seulement contribuer à la protection de l'écosystème, mais aussi augmenter leurs revenus.

Comme Medog est situé le long de la frontière entre la Chine et l'Inde, de nombreux gardes forestiers sont également des patrouilleurs frontaliers.

Tashi Tsephel, le directeur du poste de protection de la forêt de Gutang, est l'un d'entre eux. Tashi organise des patrouilles à grande échelle tous les mois. Au moins 10 fois, ils sont intervenus pour sauver des animaux sauvages.

Tashi et ses coéquipiers participent à la protection de la sécurité intérieure tout en patrouillant dans les montagnes et en protégeant les forêts. Il se dit être un "guerrier écologique", mais aussi un garde-frontière désintéressé.

 

Conserver notre trésor

Le caractère unique de ce paysage rare ainsi que sa situation géographique ont rendu l'écosystème du Grand Canyon de Yarlung Zangbo d'autant plus précieux. Les efforts pour mieux l'explorer et pour trouver des nouvelles manières de protéger la région n'ont jamais été interrompus.

Avec le soutien d'un projet de l'administration nationale des forêts et de l'herbe, le centre chinois de conservation de Shan Shui et le centre de conservation de Xizijiang ont coopéré pour lancer une étude par caméra infrarouge en continu à Medog. Dans un premier temps, 80 caméras ont été installées dans les forêts du Grand Canyon de Yarlung Zangbo pour enregistrer la vie des animaux sauvages.

Les caméras ont filmé des animaux précieux, notamment des léopards des nuages, des ours noirs, des pandas de Sumatra et des pandas roux. Elles ont également découvert six couleurs distinctes du chat doré d'Asie, une nouvelle avancée.

Les scientifiques et les conseillers politiques explorent également d'autres moyens de préserver l'écosystème du Grand Canyon de Yarlung Zangbo.

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Au début de cette année, un conseiller politique chinois a suggéré d'accélèrer la construction du parc national de Yarlung Zangbo. La construction d'un parc national dans le cours inférieur de la rivière Yarlung Zangbo et autour de ses affluents sera utile pour protéger la région du sud-est du Xizang, mais aussi pour résoudre la contradiction entre la protection de la nature et le développement des populations. "Cela promeut l'unité nationale et maintient la sécurité nationale", a déclaré Zhang Endi, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC) de Shanghai.

Le Tibet possède plus de 60 règlements et lois sur la protection de l'environnement et de l'écologie, selon une déclaration de la délégation tibétaine à Global Times. Environ 45 % de la superficie de la région est protégée par des "lignes rouges" écologiques. La région a créé 47 réserves naturelles, représentant plus de 34 % de la superficie de la région, précise le communiqué.

En outre, le Tibet a transformé les bûcherons en gardes forestiers. Depuis 2016, plus de 700 000 postes en rapport avec la protection de l'environnement ont été ouverts dans la région.

 

URL de l'article en anglais:  https://www.globaltimes.cn/page/202111/1239612.shtml